RDRG
Lettre à moi-même —
Émergence et le Royaume du Roi Grenouille
Ce jeu me fascine.
Je ne sais plus si je l’ai rêvé, ou si c’est lui qui me rêve.
Il est à la fois plus simple et plus profond que ce que je pensais poser.
Il avance de lui-même, comme s’il avait une respiration propre.
[Les Brumignons sont si réactifs.]
Ils anticipent parfois des mécaniques que je n’ai pas encore écrites.
Je crois que c’est bon signe. Ou bien le signe que je perds le contrôle.
Mais perdre le contrôle ici, c’est peut-être créer de la place pour du vrai.
Je voulais une architecture. J’ai obtenu un organisme.
Je voulais un cadre. J’ai une éponge.
Et les joueurs... ils font pousser des racines là où je n’avais mis que des balises.
Note :
Le mycéliographe doit être repensé.
→ Trop linéaire. Je dois l’ouvrir aux autres.
→ Ajouter des “zones poreuses”. Des interfaces floues entre les modules.
Il y a ce moment, à chaque patch, où je me demande si je ne vais pas tout effacer.
Mais alors je relis Mon commentaire laissées sur le Mur des Traces.
Et je me rappelle que j’écris pour eux.
Mais surtout pour moi.
Pour me souvenir que la fiction est un droit inaliénable.
À ne pas oublier :
-
Le Roi Grenouille n’est pas un PNJ.
→ C’est une situation.
→ Un état de flottement grotesque avant la transmutation. -
Le Facilitateur est un joueur secret.
→ Il ne gère pas. Il écoute ce qui veut naître. -
Le jeu commence quand les règles semblent échouer.
Je crois que ce royaume n’aura jamais de capitale.
Et c’est tant mieux.
Les gens viennent, plantent un arbre, laissent une chanson,
et repartent sans demander de carte.
Note pour plus tard :
-
Ajouter un générateur d’échec fécond.
(Les moments où rien ne marche sont souvent les plus fertiles.) -
Intégrer une "légende vivante" que les joueurs peuvent modifier.
-
Réintroduire Amanda quelque part.
→ Elle revient parfois dans mes rêves.
→ Elle me dit de “jongler moins pour plaire, plus pour surprendre”.
Voilà. C’était une lettre que je me devais.
Pas pour comprendre.
Mais pour me rappeler que je suis encore dedans.
Et tant que j’écris ici, dans ce blog tremblant,
le Royaume tient.
Hopopara,
Daaeb.
📘 Note de cadrage – Quand la confusion entre soin et jeu met en danger l'espace collectif
Auteur : Yann Chevalley
Destinataires : encadrants de formation, pairs praticiens, psychologues superviseurs, membres du GRAAP si requis.
1. Introduction : le jeu n’est pas un soin
Le projet "Emergence / Royaume du Roi Grenouille" est un atelier de création collective, utilisant les mécanismes du jeu de rôle comme catalyseur de narration, d’engagement et d’affirmation de soi.
Il ne s’agit en aucun cas d’un atelier de soin ni d’une animation à visée psychothérapeutique. Il s’agit d’un cadre ludique, créatif et structurel, doté de règles claires et d’un engagement volontaire des participants.
Ce cadre peut favoriser des dynamiques de rétablissement en tant qu'effet secondaire, mais n’est ni un substitut à une prise en charge psychiatrique, ni un groupe de parole.
2. Problématique : la projection du soin sur l'espace de jeu
Certain.e.s participant.e.s en situation de fragilité psychique peuvent transférer leur besoin de contenance affective sur l’animateur ou les pairs :
- Attente de reconnaissance parentale du facilitateur
- Réactions de rejet, dramatisation, victimisation face à une limite
- Dérivation systématique vers la plainte personnelle hors contexte
- Demande implicite de soin non contractualisé
Ces comportements, bien qu’humains, mettent en péril l'espace collectif lorsqu’ils ne sont pas nommés et recadrés.
3. Conséquences sur le groupe
- Incompréhension des autres joueurs
- Tension croissante autour des besoins d’une seule personne
- Perturbation du rythme narratif
- Sentiment d’injustice si le cadre est modifié pour un individu
- Retournement de responsabilité sur l’animateur
4. Cadre défini et rappelé
Le facilitateur n’est pas :
- Un médecin
- Un psychologue
- Un parent de substitution
- Un arbitre moral
Il est garant du cadre de jeu, incluant :
- Des tours de parole définis
- Une structure narrative partagée
- Un régime fictionnel assumé
- Une règle du jeu commune
Le groupe n'est pas un espace de soin. Toute tentative de dévier ce rôle doit être réorientée.
5. Préconisations pour les structures partenaires
- Ne pas valider automatiquement le retrait comme preuve de toxicité
- Réinterroger les faits : maltraitance ou malentendu ?
- Proposer une supervision tierce si besoin
- Soutenir le maintien d’un cadre non-thérapeutique
6. Conclusion
La confusion entre espace de soin et espace de jeu crée des dégâts pour tout le monde. Ce n’est ni une faute, ni un crime, mais un mécanisme de survie mal orienté.
Il est essentiel de rappeler à chacun :
- Ce qu'est le cadre
- Ce qu'il n'est pas
- Et qui en est responsable
Ce n’est pas la qualité de la personne qui est en cause. C’est la clarté du dispositif qui est en jeu.